• _Allo ? Hein ? … Oui... Non, non... Je m'asseyais. Maintenant ? … Je pris une clope après avoir farfouillé un petit moment dans mon sac, l'air placide puis j'allumai l'objet cancérigène. Ha. Ce soir ! ...Bah maintenant quoi. Après avoir tiré un coup sur l'objet, avalant un peu de fumée qui vint me picoter la gorge pendant que je relâchais le nuage d'entre mes lèvres, je pris mon sac en me redressant promptement. Non non ! Oui... Sans problème. Oui je l'ai. Je tapotais la poche de ma veste, poche intérieure qui fit un léger bruit, un « clic » lorsque je donna ces quelques petits coups. Au métro oui je sais. La ligne du Logan Square vous dites ..? Oui un peu. Je pris les clefs qui étaient posées sur mon lit pour les fourrer dans mon sac. Une femme c'est ..? Agressive ? Ho, je vois. Je fermais la porte de mon studio, attendant le petit bruit du verrou qui se fermait automatiquement. Puis je partis dans la rue, toujours l'appareil contre mon oreille. Non je ne pense pas. Oui, à bientôt. Pas le temps pour les formalités, mon interlocuteur avait déjà raccroché. Je mis donc mon portable dans ma poche, toujours une clope au bec. Je tirais à nouveau sur l'objet, observant autour de moi la rue pour essayer de déterminer où je devais me rendre.
  
  Il y avait du monde, un grand brouhaha mélangeant toutes les discussions qu'il pouvait y avoir. J'entendais un jeune gosse gémir auprès de sa mère, celle-ci lui criant dessus, éreintée. Puis un autre homme au téléphone, sûrement en train de parler des affaires qui marchaient au mieux ces temps-ci. Je vis quelques personnes ne parlant pas mais avec un visage assez expressif pour qu'on comprenne qu'ils n'étaient pas très joviales. Il y avait quelques mendiants, cherchant la gratitude de quelques personnes pour taxer assez d'argent et aller manger un morceau de pain. Tout ce brouhaha, tout ce bruit me donnait légèrement mal à la tête, fatiguée de toute cette agitation. Mais heureusement pour moi, je vis la ligne de métro qui était reliée avec la concernée, celle de Logan Square.
  
  J'avais pour « mission » -J'appelais cela une mission, bien qu'eux parlaient de purification de la terre, ou d'autres choses assez absurdes- de me rendre au Logan Square. Une jeune vampire avait pour habitude d'aller grignoter quelques hommes là bas. Non, elle ne les mangeait pas dès qu'il apparaissaient dans son champ de vision, mais elle faisait simplement en sorte de les attirer dans un coin après avoir usé de son charme pour les mordre. Quoi de mieux, un Lundi, à deux heure du matin qu'un métro ? Les seules rencontres que l'on pouvait faire n'étaient pas meilleures que nous, alors pouvoir mordre un humain était si facile ! Elle était agressive. C'était ce qu'on m'avais dis. Alors j'avais avec moi mon jouet, mon flingue, caché dans la poche intérieure de ma veste, mon « arme de service » en quelque sorte. Ce n'était pas un simple pistolet, pas un de ces jouets qui crachaient du feu pour nous planter du plomb dans la cervelle, mais un tout autre gadget bien utile contre ces sales monstres qu'étaient les vampires. L'objet n'était pas spécialement imposant, ni long, il était pas plus grand que ma main et était assez léger.
  
  J'eus un long soupir, déjà éreintée par tout ce monde, puis je partis, mains dans les poches de ma veste dans le métro. Je vis plusieurs sangs froids, mais ne fit que leur jeter un regard aussi glacial que leur sang. Puis j'entrai dans le premier métro qui arriva. Je regardais ma montre: 21 heure. J'allais être en avance, j'allais sûrement devoir attendre avant de pouvoir sauver le pauvre humain qui sera prisonnier de cette vampire. Mais ça ne me faisais pas spécialement peur. Je sortis donc du moyen de transport une fois à destination, celle-ci annoncée avec la voix d'un homme, voix assez robotique ne prononçant pas parfaitement toutes les syllabes. Une fois à l'endroit, je balayais le lieu du regard. Il y avait quelques bancs, des piliers dont la peinture noir commençait légèrement à virer au gris et puis des saletés étendues sur le sol, bien qu'elles n'étaient que très peu nombreuses par rapport à d'autres quartiers. On voyait directement que ce coin était peuplé de vampires. Avec quelques boites de packs de SAP éparpillées sur le sol, quelques restes de ce liquide carmin s'étant incrusté dans la pierre grise du trottoir. Après avoir donné un bon coup de pied à l'un de ces packs, j'eus comme un rictus, dégoutée, dégoutée qu'on puisse prendre du plaisir à boire du sang, qu'on puisse désormais vivre en tuant des humains, dégoutée par toute cette injustice. Étais-ce ça ? Le monde actuel ? C'est bien connu, les faibles sont toujours soumis, ceux qui sont au plus bas de la hiérarchie. Et si l'on comparais l'homme avec le vampire, on voyait tout de suite qui était en difficulté. Oui, on avait des armes, mais si on n'agissait pas tout de suite, on allait très vitre perdre la main.
  
  Après ce petit moment de songes, je pris place sur un banc, plongeant ma main dans mon sac pour prendre un livre que je venais d'acheter avant d'avoir eu ma mission. Je me cala le dos contre le mur puis attendis, patiemment, l'arrivée du monstre, allait-elle être rousse ..? Ou blonde ? Un brune ? L'attente se faisait sentir, j'avais du mal à me concentrer sur mon livre, mes pensées revenaient directement à ma mission. Surtout qu'il fallait que je sois aux aguets, sursautant au moindre bruit qu'un chat faisait en écrasant une canette ou que le vent faisais en traversant le métro. Je surveillais, les venues du métro puis les départs de celui-ci, les passants, leur teint leurs cheveux leurs yeux leurs lèvres. Puis vint un moment où... Rien. Plus rien, plus un bruit. J'eus l'impression d'être seule au monde, isolée, d'abord, je crus que j'avais attendu tellement longtemps que les vampires avaient déjà eu le temps de s'emparer du monde et n'avaient plus besoins du métro grâce à leur vitesse sur-développée. Mais promptement, je me raisonna, je n'étais pas du genre à m'imaginer des choses complètement irrationnelles. J'étais juste en train de m'impatienter.
  
  Puis vint un bruit, ce bruit. Puis une voix, qui me semblait familière, mais cela ne me déstabilisa pas, je me disais que souvent des personnes avaient des voix semblables. Je me leva donc, allant voir qui était là, convaincue que c'était la vampire, convaincue après avoir entendu le cri d'un homme affolé. Je me mis devant les deux personnes, prêtes à sortir mon arme, prête à tuer ce vampire, mais a peine j'eus mis ma main dans ma poche, que j'avais compris. _...S-S-Sarah !?

• Non... Impossible... Se devait-être un cauchemar ! Ma seule amie. Enfin, la seule personne avec qui j'avais des liens autres que professionnels. Elle ! Sarah ! Je n'avais pas rêvé ! Ses dents, sa peau, son regard... C'était bien un monstre. Il fallait qu'elle aussi, soit horrible, soit la chose que je haïssais le plus au monde. Pourquoi ? Pourquoi ma vie tournait-elle toujours autour des vampires ? Je ne pouvais pas vivre un peu normalement ? Voilà que je me prenais à trembler, hésitante. Je tremblais de peur comme de rage, je bouillonnais, on m'avait à nouveau prise pour une conne, une folle. J'avais peur, peur de tuer quelqu'un que j'appréciais. Mes pensées se chamboulaient, comment réagir ? Comment !? Je ne savais pas, je ne savais plus rien, tout le courage que j'avais accumulé pour aller tuer une vampire venait d'être réduit à néant. Sarah... Non... À tous les coups, elle s'était rapprochée de moi pour me soutirer des informations sur la secte. C'était normal après tout... Qui viendrait m'aborder, moi, la folle sortie de l'hôpital psychiatrique ? Qui deviendrait aussi proche de moi alors que je ne parle que de vengeance ? Non, c'était normal. J'aurais fait pareil, à sa place...
  
  « Oh fait chier... » Furent les seuls mots qui sortirent de sa bouche. J'eus un léger sursaut, m'attendant à une réaction plus prompt de sa part, à ce qu'elle m'attaque. Oui, je m'étais déjà faite à l'idée que je n'étais qu'un jouet pour elle... Bah oui, les vampires s'amusent tellement de la naïveté des humains ! C'est bien connu ! Mais je doutais toujours... Pourquoi douter !? Elle ne bouge pas ! Sors ton flingue et finis en une bonne foi pour toute ! Mais... Elle était si importante... Si... Unique. La seule qui essayait de me comprendre. Non, attends Jules, attends une réaction, peut-être... Peut être... Peut-être qu'elle... Qu'elle... Quoi ? Sa réaction n'allait rien changer à ce qu'elle était ! C'était un monstre, une vampire ! Ton amie. L'était-elle encore ..? Une amie ? Comment... Comment lui pardonner ? Mais surtout, comment faire pour qu'elle ne soit plus « ça » ? Tout était trop confus, c'était plus qu'un gros bordel dans mon esprit, j'étais complètement perdue.
  
  L'homme partit, je ne m'en rendis compte que quelques minutes après, car il n'était pas important. Il n'était rien, qu'un homme assez con pour répondre à des avances d'une jeune femme sans penser qu'il était loin de l'intéresser avec ses 50balais. « Jules, écoutes, je voulais t'en parler... » Je ne l'avais pas quitté du regard une seule seconde. Et je ne la croyais pas, j'étais naïve, mais pas au point de la croire une deuxième fois. Elle ne m'en aurait pas parlé ! Jamais. Elle savait bien comment j'étais avec les monstres et elle savait parfaitement que j'étais dans la secte, en aucun cas un vampire se risquerait à me révéler sa nature si je l'ignorais. Rhaah ! Quel beau merdier ! _Non... Non. Tu ne penses pas avoir suffisamment menti comme ça !? Ma voix se faisait froide, irritée et mon regard fulminant. Je ne voulais pas montrer à quel point j'étais troublée, perdue, à quel point j'hésitais. Je comptais la faire fuir, qu'elle part ! J'allais dire à la secte qu'elle s'était échappée, que je n'avais pas envie de la chasser elle, que je préférais tuer les hommes. Aller, casses toi !
  
  Malheureusement, elle s'avança, j'eus un mouvement de recul bien que je sentis derrière moi le béton d'un des piliers du métro. « Ne m'en veux pas j'ai... Je voulais... J'ai jamais voulu te faire de mal tu sais... » Non. Tu es une vampire. C'est dans tes gènes, vouloir me faire mal. Arrêtes avec tes beaux discours ! Ne me regardes pas comme ça ! Voilà que ma main se prenait à trembler. Il fallait que je réagisse, pour ne pas flancher. C'est une de ces créatures, qui a détruit mon monde, ma famille, ma vie. Je ne devais en aucun cas l'oublier. Je mis promptement ma main dans ma poche pour sortir mon arme, la tenant de mes deux mains, celles-ci tremblantes, j'étais presque pitoyable à regarder... _T-Tais toi ! La ferme ! La ferme ! Je ne la quittais pas des yeux, bien que j'aurais préféré regarder ailleurs, faire comme-ci je n'avais jamais rien vu, rien entendu, comme-ci j'avais oublié. Mais je ne pouvais pas, alors mes yeux commencèrent à être humide, voilà que je redevenais instable, pouvant passer de mon état placide à affolée. Je calais mon dos contre la paroi de pierre, essayant d'empêcher ces sales tremblements pendant que ma vue se troublait à cause de l'humidité qui envahissait mes yeux. _Sale... Sale... Je n'arrivais même pas à trouver une insulte assez convaincante. T-Tu... Tu t'es foutus de ma gueule !? Tu... MERDE ! Je serrais plus fort mon arme entre mes mains, capable de tirer au moindre mouvement brusque mais, pourtant assez tremblante pour rater ma cible même à deux mètres de moi.

• J'étais essoufflée. Pourtant, je n'avais pas couru ni fournit énormément d'effort jusqu'à maintenant. Mais mon souffle était saccadé, je voyais mal, je tremblais, mon ventre se nouait et ma gorge aussi. J'avais l'impression d'être retournée le jour de la mort de mes parents, cette sale impression ce goût amer de profonde tristesse qui me traversait... Tout était là pour me rappeler le pire jour de ma vie. Je lui en voulais encore plus, de me le rappeler, je m'en voulais encore plus, de lui avoir montré à quel point je pouvais rester humaine lorsque la folie ne venait pas m'atteindre. Je me sentais trop mal pour pouvoir tirer, bien que j'avais pleinement la force pour le faire, je n'en avais pas le pouvoir. Je ne voulais pas être la personne qui l'extirpera de la « vie » -bien qu'elle soit déjà morte-. Je ne voulais pas voir son visage avant de la tuer. Elle. Non. Un autre, je pouvais facilement, un autre monstre.
  
  Mais pas elle.
  
  « Je comprends tout à fait que tu m'en veuilles. Mais laisses-moi au moins t'expliquer pourquoi j'ai fais ça. » Oui je t'en veux. Tes explications je les connais déjà, tu t'es servis de moi, comme tout le monde. Vous vous servez tous de moi, la Secte pour battre les vampires, les vampires pour me tirer des informations de la secte, les humains pour les protéger des vampires et de la secte, les lycans pour les aider à battre les vampires. Aucun de vous ne m'aime pour ce que je suis mais, pour ce que je représente. Mais il est vrai que je suis folle, que je ne vis qu'en tuant au moins une fois par jour, que la mort ne me touche pas, que l'idée de perdre un proche ne m'atteint même pas. Oui, je suis loin d'être le genre de personnes appréciables. C'est sûrement pour cela que la secte me garde, une personne qui n'a que très peu de liens sociaux et donc qui ne peuvent être bernées par des vampires. Pourtant, là, je venais de me faire manipuler royalement par la jeune fille... Mais... Son regard me semblait tellement franc que je n'arrivais même pas à me convaincre ce s'en était de la comédie...
  
  Puis elle s'avança, je me calais encore plus contre le mur -si c'était possible- en agitant mon arme, bras tremblants pour lui montrer que je ne rigolais pas en la menaçant. « Voilà, la première fois, si je suis venue te parler, c'est parce que je voulais avoir des nouvelles d'une personne que je connais, et qui fait partie de la secte. Voilà, elle voulait se servir de moi. A la fin de sa phrase, je lui jetas un sale regard, irritée et pourtant triste. Elle s'était jouée de moi, et je n'avais rien remarqué... J'étais vraiment stupide. J'aurais dû voir ses dents, ses lèvres, son teint... Mais je me disais que je l'appréciais justement car elle ressemblait à ces êtres tant détestés. Elle était belle, magnifique, elle avait une aura, une présence... Tout cela venait de sa race, et je ne l'avais même pas vu. Je suis bornée. Vraiment. Je n'avais pas l'intention de te mordre ni quoi que ce soit. Même si on a peu parlé ce jour-là, il y a quelque chose chez toi qui m'a touché. Oui. Moi aussi. Pourtant, je n'ose pas te croire, je ne le veux pas. Mais, d'un autre côté... Si elle m'avait dit qu'elle était un vampire, je doute que je l'aurais appréciée autant que je l'apprécie maintenant. Je t'ai peut-être menti sur ma vraie nature, mais en ce qui concerne mon attachement pour toi, c'est sincère, je t'assure Jules. » J'eus un petit soupire qui sortit de mes lèvres, encore plus perdue avec tout ce qu'elle me disait. _Arrêtes ! Ne t'approches pas ! Tu entends !?
  
  « Si tu ne me crois pas, alors qu'est-ce que tu attends. Tires, vas-y ! C'est ton boulot après tout... » J'eus un plus grand tremblement, je savais bien qu'elle voulait me dissuader en déclarant cela, mais bien consciente de ce qu'elle faisait, je n'y arrivais pourtant pas. Je serrais mon arme entre mes doigts avant de lâcher un long soupire pour déclarer. _Barres toi ... Ma voix ne fut pas très forte. Ce n'était qu'un léger chuchotement caché parmi le bruit de quelques voitures qui passaient près du métro. _Casses toi. Une deuxième fois, je le disais, mais sur un ton encore plus froid. Puis je pris l'arme qui logeait entre mes deux mains pour la mettre seulement dans ma main droite et la pointer sur mon front. Oui. Je suis complètement folle. _Casses toi ou j'me flingue ! Je ne plaisante pas ! Et voilà que quelques larmes vinrent perler sur mes joues, je devais inspirer la pitié, être pitoyable, complètement. Je crois que j'étais tombée bien bas à ce moment-là, pourtant, je me savais bien capable de me tirer dessus. Je savais que je ne pouvais tirer sur elle, mais sur moi, ce serait un jeu d'enfant. Eh bien ? Le suicide, j'y ai pensé tellement de fois ! Ça ne me fait plus peur. Bien que je me disais que je devrais me venger avant de mourir... Mais je devais faire un choix. Elle ou moi. Je ne pourrais vivre tranquillement en pensant à elle, tous les jours, en me disant que j'aurais peut-être dû la tuer, ou alors que je ne méritais pas de vivre pour ne pas avoir fait ma vengeance « complète » sur les vampires. Je suis tarée.

« Barres toi ... » Jules semble de plus en plus mal. J'aimerais pouvoir faire quelque chose pour la rassurer, la calmer. Mais c'est ma présence qui la met dans cet état, alors c'est impossible. Je ne sais pas si elle s'attend vraiment à ce que je parte. Je ne sais pas non plus si elle a l'intention de me tirer dessus si je ne bouge pas. Je n'ai pas envie de partir. Je ne peux pas la laisser dans cet état, je me sens responsable de cette fille. « Casses toi. » Le ton de sa voix se fait beaucoup plus froid. Si je ne bouge pas d'ici elle risque de s'emporter très vite. Pourtant je reste là, je la supplie du regard pour qu'elle se calme. Je ne peux rien faire si elle s'énerve. Je me connais, je vais finir par m'emporter à mon tour, et ce sera encore pire. Je tente de garder mon calme, bien que la situation commence sérieusement à me gêner. Je m'en veux de ne pas lui avoir dis ce que j'étais. Mais si elle l'avait su, jamais elle ne m'aurait reparlé par la suite, et même, elle aurait essayé de me tuer. Non, ce que je regrette vraiment, c'est de ne pas avoir fais plus attention ce soir. Si je m'étais montré plus discrète, elle ne m'aurait pas vu et rien de tout ça ne se serait passé.

Soudain, je vois Jules détourner son arme, pour poser le canon sur son front. Changement de programme, je n'avais vraiment pas prévu ça. Sur l'instant, la panique m'envahit. Si elle tire je m'en voudrais, je n'ai pas envie qu'il lui arrive quelque chose, je ne veux pas qu'elle meurt, surtout par ma faute. « Casses toi ou j'me flingue ! Je ne plaisante pas ! » Eh merde. Qu'est-ce que je suis censée faire. Partir ? Non. Même si c'est ce qu'elle me demande de faire, je ne bougerais pas. « Non ! Déconnes pas, s'il te plait ! » Jamais je n'aurais pensé me mettre dans un tel état pour une simple humaine. Ça ne me ressemble pas, c'est vrai. Mais Jules est différente. Elle a cette rage contre les êtres de mon espèce. Cette envie de vouloir les exterminer, il y a quelque chose en elle qui me ressemble un peu. J'aurai aimé pouvoir la connaître un peu mieux, en apprendre plus sur elle, mais j'ai cette étrange impression que ce sera le dernier soir où l'on se verra. « Je suis désolée, vraiment. Mais fais pas ça, je préfère encore que tu me tue ! » Je ne sais même pas si je pense vraiment ce que je viens de dire ou non. Dans un sens, je crois que oui. Elle est en train de se sacrifier pour moi. Elle était censée me tuer, elle était venue pour ça. Mais visiblement elle préfère se tirer une balle plutôt que de me viser. Je ne veux pas qu'elle fasse ça pour moi. Elle mérite mieux. C'est vrai, de nous deux, qui mérite le plus de mourir ? Je passe mon temps à tuer des humains pour me nourrir... Totalement immobile, je fixe l'arme appuyée sur le front de la jeune fille. Cette situation devient pathétique. Pourquoi Jules se sacrifierait-elle pour moi ? Alors que je viens de lui mentir. Je ne pensais pas qu'elle aurait été capable d'une telle chose.

La colère commence à grimper. Si elle ne m'écoute pas, j'emploierai les grands moyens. Sans qu'elle n'ait le temps de réagir, je peux très bien attraper son flingue. Mais j'ai peur qu'avec la pression qu'elle a sur la détente, elle ne tire par réflexe. Seulement, je ne vois pas vraiment d'autre solution. J'aurai beau lui dire n'importe quoi, elle ne m'écoutera pas. Jules tremble toujours autant, voire même de plus en plus. Son regard exprime tellement de peur et de rage. Le mien au contraire, est rempli de peine. Mais la colère prend rapidement le dessus. « Ça suffit maintenant ! Tu vas lâcher ce putain de flingue, Jules ! » Je ne sais pas si j'ai bien fais de lui parler de cette façon. Le ton de ma voix est beaucoup plus froid, mais comme toujours, je perds patience. Je ne vais pas rester planté là, à attendre qu'elle lâche cette arme ou qu'elle s'explose la cervelle. Si je ne fais rien cette situation peut durer un bon moment. Au moment où je me décide enfin à aller chercher le flingue, une masse me pousse violemment sur le côté, me faisant heurter contre le lampadaire situé à quelques mètres de nous, et me bloquant contre celui-ci. Putain de lycan. Il a dû être alarmé par le son de ma voix, j'ai dû parlé un peu trop fort sur ce coup. Je suis sûre qu'il pensait que j'allais faire de Jules mon repas.

Il tente de m'effrayer et m'impressionner avec ses crocs, mais je suis tellement préoccupée par l'état de Jules que je n'y prête pas tellement attention. Tout ce que je veux, c'est qu'il s'en aille. Qu'il nous foute la paix. D'un violent coup de genoux, je l'envoie quelques mètres plus loin, avant de me jeter à mon tour sur lui. A dire vrai, je n'ai plus envie qu'il parte, j'ai un grand besoin de me défouler. Le problème, c'est que Jules risque de m'en vouloir si jamais je le tue. Pour le moment, il n'y a aucun risque, car celui-ci semble avoir une étonnante force. D'un seul coup de patte, il arrive à m'étourdir quelques secondes, le temps pour lui de réussir à me maintenir au sol. Je n'arrive pas à être concentrée, tout ce qui m'importe, c'est Jules, et si je n'arrive pas à reprendre rapidement mes esprits, il risque de m'achever sans aucun problème. Je me laisse alors envahir pour la colère, et les coups s'enchainent, les grognements résonnent, bientôt cachés par le crissement du métro...

• Je tremblais, mais moins. Je semblais moins hésitante à me flinguer qu'à la flinguer. Même si je savais que j'allais renoncer à tous mes rêves en me tuant et que j'avais tué un bon nombre de vampires pour rien. Enfin si... Par vengeance, mais ce n'était que pour patienter avant de le voir. Lui. Celui que j'avais déjà tué, torturé, un bon nombre de fois, dans mon esprit. J'allais renoncer à cette vengeance pour ne pas avoir à la tuer. Je devais vraiment l'apprécier pour avoir décidé que je méritais plus de mourir qu'elle. « Non ! Déconnes pas, s'il te plait ! » Je fus à nouveau prise d'une légère convulsion. Voilà que sa voix me déstabilisait. J'étais vraiment pathétique, pitoyable, incroyablement faible, face à cette fille. Pourquoi n'avais-je toujours pas tiré ? Pour entendre ce qu'elle avait à me dire ..? Je voulais peut-être une preuve de ce que je pouvais représenter pour elle ..? Pourquoi ? Trop de questions. Vraiment, un gros trop, un gros bordel, je ne réfléchissais même plus, j'étais simplement paniquée. « Je suis désolée, vraiment. Mais fais pas ça, je préfère encore que tu me tue ! » Ça m'arracha un sourire. Narquois. Je ne savais pas vraiment pourquoi, mais j'avais envie de sourire en entendant ça. Pourtant, ce n'était pas vraiment ce que je voulais qu'elle fasse, j'avais toujours les joues humides et je voyais toujours trouble. Pourtant, je souriais, parce que j'avais là la preuve qu'elle était un tant soi peu attachée à moi. Mais je me disais que quelqu'un de plus censé serait déjà partit... Mais je me disais aussi qu'une personne n'ayant rien à faire de moi serait partie depuis le moment où j'avais pointé l'arme sur mon front, profitant de ce moment de faiblesse pour s'esquiver et sauver sa vie. Non. Elle devait au moins m'apprécier... Enfin... J'essayais de me convaincre, que cela était le cas.
  
  _L-La ferme ! La ferme ! A-Arrête... Ta voix... J'eus une nouvelle convulsion en parlant , les yeux rouges tellement je pleurais, les joues désormais recouvertes de larmes. J'avais honte de me montrer comme ça, aussi sensible, instable, j'aurais mieux fais de partir sans regarder ce que Sarah faisait. « Ça suffit maintenant ! Tu vas lâcher ce putain de flingue, Jules ! » Elle me donnait un ordre, ce qui m'arracha un petit cri de rage que j'essayais d'étouffer entre mes dents mais qui passa malgré tout, montrant que j'avais horreur de cela. Je serrais plus fort mon arme, désormais chaude à cause de mes mains moites qui avaient réchauffées tout le manche de l'objet. _Ne me donnes pas d'ordres ! … Je voulus dire quelque chose d'autre, mais un putain de nouveau problème vint s'ajouter à celui actuel. Un putain de problème.
  
  Un putain de Lycan.
  
  Il poussa violemment la jeune femme contre un lampadaire, déformant celui-ci qui se mit à clignoter, donnant une ambiance presque dramatique à la scène. L'animal était horrible, d'une fourrure grise avec quelques endroits marrons, un regard noir et des dents pas bien blanches. Il n'était pas beau. En temps normal, j'aurais été ravie qu'un Lycan vienne me prêter main forte pour assassiner un vampire, mais pas là... Là, c'était Sarah... Là, je ne savais plus quoi faire... Elle renvoya l'animal d'un coup de genou, se jetant sur lui, mais elle semblait distraite. Le monstre reprit le dessus en quelques minutes, je la voyais en mauvais état. Pourtant, elle ne semblait pas faible, pourtant, je savais qu'elle avait toutes ses chances, mais elle n'avait pas le dessus... Alors je m'affola, je pris mon arme à deux mains en visant les deux gens qui bougeaient promptement. La vue troublée, je ne savais même pas qui je visais, mais je ne voulais pas rester plantée, là, à rien faire. Je ne voulais pas être faible... Laisser encore quelqu'un que j'aimais mourir devant moi, non, pas encore...
  
  _SALOPERIE ! Je tira, visant sa patte, ne voulant pas le tuer. Mais je voulais tout de même aider son adversaire... Pour la première fois de ma vie, je voulais sauver quelqu'un de son espèce. Oui, j'étais en train de tirer sur le Lycan, j'avais eu de mal à viser correctement, celui-ci s'agitant trop, mais j'avais pourtant pu lui tirer dans la patte, bien que j'avais visé à l'origine son estomac. L'animal poussa un petit cri de douleur. _On t'as rien demandé ! Si quelqu'un peut la crever ici c'est bien moi ! Pas toi ! Barres toi ! Laisses la... Merde ! J'étais vulgaire, toujours aussi pitoyable, complètement décoiffée, les yeux encore plus rouge que tout à l'heure, les joues humides mais vierges de larmes, le bras ballant, je fis tomber mon arme au sol, espérant que l'animal allait partir.
  
  Le silence restait, seul le petit bourdonnement du métro lointain et le claquement qu'avait produit mon arme en ayant eu un contact avec le sol étaient parvenus à mes oreilles...